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Le blog de Lee TAKHEDMIT

Blog de Maître Lee TAKHEDMIT, avocat pénaliste à PARIS, POITIERS, NIORT

Condamné « pour sa génétique », il ne bénéficie pas de la légitime défense

Le sang de mon client du jour ne fait qu’un tour lorsque sa femme revient à la maison le visage en sang après avoir été prise à partie dans un vide-grenier. On l’avait accusée de pratiquer des arnaques au rendu de monnaie. Puis tabassée…

Tout le monde dans le camion, femme, enfants, et en route pour le vide-grenier en quête d’explications (ce qui n’est jamais une bonne idée…) !

A peine arrivés sur place, le ton monte, évidemment, et cette fois c’est le mari et la femme qui sont pris à partie, insultés, traités de rabouins, de sales gitans, et j’en passe.

Les esprits s’échauffent, une nouvelle empoignade intervient entre madame et ses opposants, le mari sépare tout le monde, puis un quidam se met bille en tête d’intervenir en approchant ce dernier par derrière. Il le bouscule, mon client se retourne, fait de même, mais l’assaillant n’est pas plus épais qu’un sandwich sncf, il s’envole et termine la tête contre le sol, sonné pour le compte.

Mon client, issu de la communauté des gens du voyage, est renvoyé en correctionnelle.

Lorsqu’il me confie cette affaire, il affirme qu’on veut « le condamner pour sa génétique » ! C’est vrai que dame nature lui a donné un physique pour le moins imposant, un bon mètre quatre-vingt-cinq pour un petit quintal…

Le dossier est assez clair, les témoins convergent plus ou moins vers la confirmation de l’histoire telle que rapportée ci-dessus.

Je plaide la relaxe, bien entendu, pour légitime défense.

A ma grande surprise, le procureur abandonne les poursuites. Plus précisément, il explique être mal à l’aise avec ces poursuites et « s’en remettre à la sagesse du tribunal ».

Qui ne l’entend pas de cette oreille. Et condamne mon client, en indiquant que la riposte ne peut pas être considérée comme proportionnée, car en un seul coup, mon client a mis son adversaire K.O.

J’ai eu la parole en dernier, je ne peux même plus expliquer à la juge ce que tout juriste sait ; la proportion de la riposte n’a rien à voir avec les conséquences de la riposte. Cour de 2ème année de droit. En l’espèce, à une « bousculation », comme dit mon client, il a été répondu par une autre bousculation.

Avec son sens inné de la répartie, mon client ne s’embarrasse pas du tour de parole et indique à la juge un résumé de ma pensée juridique du moment : « ce n’est pas mon coup qui a mis le monsieur K.O., Madame, c’est le trottoir »…

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