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Le blog de Lee TAKHEDMIT

Blog de Maître Lee TAKHEDMIT, avocat pénaliste à PARIS, POITIERS, NIORT

De l’impossibilité d’acquitter un coupable

Dans un procès pénal, on peut se trouver en position d’être objectivement innocent et coupable à la fois.

Cela se produit lorsque l’on est poursuivi pour une infraction spécifique que l’on a pas commise, mais pas poursuivi pour une autre qui aurait pu être constituée, mais dont on a fait l’économie de vous la reprocher.

L’exemple typique, c’est la combinaison de l’association de malfaiteurs avec d’autres infractions, par exemple le trafic de stupéfiants.

Ces deux infractions ont des éléments constitutifs tout à fait différents, si bien que si le Tribunal veut vous condamner pour les deux infractions, il doit établir votre culpabilité sur les deux plans.

Cependant, il ne peut vous condamner pour une infraction qui si le Procureur de la République ou le Juge d’instruction vous a poursuivi pour cette infraction.

Or il arrive assez régulièrement que les prévenus ne soient poursuivis que pour trafic de stupéfiant ou bien pour vols, si bien que si l’infraction n’est pas constituée, la seule solution pour le Tribunal ou la Cour d’assises et de relaxer ou acquitter la personne poursuivie.

Il y a peu, je défendais un jeune homme accusé de trafic de stupéfiant, dans un dossier où il n’y avait aucun élément objectif permettant d’imaginer qu’il ait pu acquérir, détenir, transporter et encore moins vendre de la drogue.

Il existait dans le dossier un certain nombre d’éléments de proximité avec les acteurs du trafic, qui auraient pu légitimer des poursuites pour association de malfaiteurs, mais le juge d’instruction et le Parquet, sûrs de leur fait, n’avaient pas envisagé les choses sous cet angle et l’avaient donc uniquement renvoyé pour le trafic.

D’une manière assez incompréhensible, il fut relaxé pour les faits d’acquisition et de vente de produits stupéfiants, mais condamné pour détention et transport, alors qu’aucun élément du dossier ne le permettait.

Manifestement, le Tribunal avait considéré que sa proximité avec le trafic, le fait qu’il gravitât autour de ses acteurs principaux faisait de lui l’un des membres du réseau.

Seulement, la requalification de faits de trafic de stupéfiants en faits d’association de malfaiteurs n’est pas possible, les éléments constitutifs de chacune de ces infractions étant totalement distincts.

Le Tribunal n’avait que deux options : relaxer car le trafic de stupéfiant ne tenait pas et il fallait assumer l’année de détention provisoire subie, ou bien condamner, même au prix d’un montage judiciaire incompréhensible, ce qui fut fait.

Mon client fut condamné bien moins lourdement que le traitement initial du dossier ne le laissait présager, mais bel et bien condamné quand même.

Bien qu’innocent, on le déclara coupable. Pas des faits qu’il pouvait avoir commis, mais des faits pour lesquels on l’avait poursuivi et qu’il n’avait clairement pas commis.

Parce qu’un coupable, même mal poursuivi, même poursuivi en dépit du bon sens et par l’entêtement d’un parquetier et/ou d’un juge d’instruction trop sûrs d’eux, doit être condamné.

 

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